mardi 19 mars 2024

« Remplacer l’État providence par l’État protecteur » : les mensonges de Bruno Le Maire sur la « gratuité »

Le ministre de l’Économie assène que notre modèle économique et social va dans le mur à cause de la « gratuité » des prestations. C’est faux. Les services publics comme la protection sociale ne sont pas gratuits : ils sont financés par ceux qui en bénéficient.

 « La gratuité de tout, pour tous, tout le temps, c’est intenable » ! Avec cette phrase prononcée dans les colonnes du Journal du dimanche, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, se livre à une attaque en règle contre le système de protection sociale et les services publics. Il se rend coupable de désinformation pour justifier ses velléités austéritaires.

Le locataire de Bercy, rappelons-le, a annoncé un nouveau train de coupes dans les dépenses publiques de 10 milliards pour 2024, et de 20 milliards supplémentaires en 2025. Forcément, il faut trouver une rhétorique pour le justifier en alignant les clichés les plus populistes.

« Nous devons remplacer l’État providence par l’État protecteur », égrène le ministre, qui qualifie « l’État providence » de « machine à empiler de nouvelles dépenses publiques, sans examen de leur pertinence ni de leur efficacité, sans remise en cause non plus des dépenses précédentes ».

« En finir avec la gratuité »

Au-delà de ce catéchisme ultralibéral, Bruno Le Maire véhicule un mensonge. Les services publics, les aides et prestations sociales ne sont pas « gratuits ». Si des prestations sont fournies sans reste à charge lorsqu’elles sont sollicitées de droit, c’est parce qu’elles ont été préalablement financées par ceux-là mêmes qui en bénéficient. Les écoles publiques sont financées par les impôts. Les prestations sociales ne sont possibles que par les cotisations versées par les salariés et les entreprises.

De façon mensongère donc, Bruno Le Maire pousse jusqu’à séparer ceux qui cotisent de ceux qui perçoivent ou bénéficient d’une prestation du service public. « Il y a toujours quelqu’un qui paie la gratuité », ose le ministre, alors que ceux qui contribuent en fonction de leurs moyens et perçoivent en fonction de leurs besoins sont les mêmes.

La charge étant jugée « trop lourde » pour les salariés, Bruno Le Maire en arrive à la conclusion qu’il faudrait « en finir avec la gratuité », c’est-à-dire les faire payer, pour alléger leur fardeau.

Le ministre de l’Économie n’est pas idiot. Cet exercice rhétorique cache à peine ses intentions : ne pas mettre davantage à contribution ceux qui en ont les moyens et bénéficient de longue date des largesses des finances publiques.

S’il existe des dépenses publiques « sans examen de leur pertinence ni de leur efficacité », elles sont à chercher du côté des aides versées sans contrepartie aux entreprises privées. Pour elles, pas d’autre sermon qu’une nouvelle invitation polie du ministre à « continuer » à augmenter les salaires.

samedi 16 mars 2024

« Irresponsabilité et cynisme », discours qui « alimente la guerre »… les réactions à l’interview d’Emmanuel Macron sur l’Ukraine


 Le président de la République, interrogé aux 20 heures de TF1 et France 2 jeudi 14 mars, a martelé que « toutes les options sont possibles » quant au soutien à l’Ukraine face à la Russie, sans fermer la porte à l’envoi de troupes. À gauche, des voix s’élèvent pour dénoncer une surenchère belliqueuse.

Le service après-vente assuré par le président sur France 2 et TF1, jeudi 14 mars, après ses déclarations n’excluant pas l’envoi des troupes en Ukraine, n’a pas manqué de faire réagir. « La Russie ne peut pas et ne doit pas gagner cette guerre », a martelé le président de la République, répétant que « toutes les options sont possibles » tout en se défendant de jouer l’escalade. « Vouloir la paix, c’est ne pas laisser tomber l’Ukraine », a insisté le chef de l’État, à l’attention des forces d’opposition française qui ont voté contre l’accord de soutien à l’Ukraine à l’Assemblée nationale, les accusant de faire « le choix de la défaite ».

« Macron, prêt à déclarer la guerre à la Russie »

Les communistes et les insoumis, qui ont voté contre, dénoncent les surenchères guerrières dans lesquelles s’enferre l’hôte de l’Élysée« Macron, prêt à tout pour masquer son échec en France, prêt à déclarer la guerre à la Russie », a commenté sur X (ex-Twitter) le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, voyant dans ses déclarations une « irresponsabilité et (un) cynisme poussés à leur paroxysme ».

« Le Président fait peur. Il sait qu’assit, on finit par se lever », a également réagi l’insoumis Jean-Luc Mélenchon, en référence à une hasardeuse démonstration tentée par Emmanuel Macron en début d’interview consistant à comparer la possibilité laissée ouverte d’envoyer des troupes en Ukraine à celle de se lever alors qu’on est assis. Il sait aussi, poursuit l’ancien candidat à la présidentielle, « que si on alimente la guerre, on finit par la faire soi-même. Ceux qui veulent la paix préparent la paix. Lui non ».

À droite, le président de LR Éric Ciotti, dont la formation a voté en faveur de l’accord avec l’Ukraine symboliquement soumis à l’Assemblée, tente de se distinguer : « Soutenir l’Ukraine, oui. Souffler sur les braises d’un potentiel conflit mondial à des fins électorales, non. » Quant à l’extrême droite, Emmanuel Macron lui laisse la possibilité, à quelques mois des élections européennes où les sondages la donnent en bonne place, de se gausser de ses ambiguïtés. « On n’a toujours pas compris comment il prévoyait de régler le conflit russo-ukrainien, quelles étaient les actions concrètes qu’il comptait mettre en place », a ainsi déclaré, sur franceinfo, Laurent Jacobelli, porte-parole du RN, dont les députés se sont abstenus mardi au Palais Bourbon.

Débat Ukraine Mardi 12 mars 2024 - Assemblée nationale - Intervention Fabien ROUSSEL

Il y a deux ans, quasiment jour pour jour, ici même devant vous, je dénonçais au nom de mon groupe GDR et des députés communistes l’offensive criminelle lancée par le nationaliste Poutine, en violation de toutes les règles du droit international. Dans cette guerre, il y a bien un agresseur, Vladimir Poutine, et un pays en état de légitime défense, l’Ukraine, qu’il faut soutenir.

C’est pourquoi nous avons voté en novembre 2022 la résolution de soutien à l’Ukraine et la condamnation de la guerre lancée par la Russie.

Notre position n’a pas changé depuis. Oui, la Russie ne doit pas gagner la guerre, oui, il faut donner à l’Ukraine les moyens de se défendre, comme nous l’avons fait jusqu’à maintenant.

Et je le dis ici au nom de mon groupe : ce soutien doit être apporté dans le cadre défini par la France il y a deux ans, c’est-à-dire avec des lignes rouges à ne pas franchir, pour que la France n’entre pas en guerre directe avec la Russie et ses alliés.
Les déclarations va-t-en-guerre du Président de la République sur l’envoi de troupes françaises en Ukraine, ne mettant aucune limite à notre soutien à ce pays en guerre et confirmées lors de notre réunion à l’Élysée, ont fortement choqué nos compatriotes.

La perspective de la guerre et son cortège de souffrance sont entrés brutalement en France, dans chaque foyer, dans chaque famille.

La France, je le dis ici avec gravité, a une autre voix à porter que celle de la guerre, quand celle-ci a déjà provoqué la mort d’un demi-million de personnes et semé le chaos aux portes de l’Europe.

C’est une véritable boucherie. Au nom de l’humanité, nous devons tout mettre en œuvre pour qu’elle s’arrête et au plus vite !

Dans quelques semaines, nous allons célébrer le 80e anniversaire du Débarquement. Notre pays, avec d’autres, a subi dans sa chair le martyr de deux conflits mondiaux, au 20e siècle, soldés par des dizaines de millions de morts.

Notre responsabilité vis-à-vis des jeunes générations est plus lourde que jamais. Pendant des décennies, nous leur avons promis, haut et fort : « Plus jamais ça ».

Faisons respecter cet engagement, celui sur lequel précisément est née l’Union européenne.

Rien, rien ne justifie que nous lancions notre jeunesse dans une nouvelle folie meurtrière, placée de surcroît sous la menace du feu nucléaire. Voulons-nous la destruction de notre civilisation ?

Car c’est bien de cela dont il s’agit quand nous entrons dans une escalade guerrière dont nul ne peut prétendre maîtriser tous les ressorts.

Tout doit être fait pour éviter une telle escalade. Et ce n’est pas l’accord que vous venez de signer le 16 février avec l’Ukraine qui peut nous conduire vers l’apaisement. Au contraire, il risque de nous entraîner encore plus dans le conflit.

Il prévoit en effet l’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne et dans l’OTAN. Nous y sommes opposés d’autant que cette question figurera en tête des négociations à venir entre les belligérants.

J’ajoute que l’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne va mettre à mal notre agriculture, notre industrie en provoquant un dumping social que les Français rejettent massivement. Comme eux, nous rejetons aussi cette idée.

Tout aussi préoccupant est le volet « coopération militaire de défense », qui est qualifié de « non exhaustifs ». C’est-à-dire sans limites, comme l’a dit le Président. Comment peut-on ainsi signer un chèque en blanc avec un état en guerre ?

Mes chers collègues, nous le savons tous ici : un jour, nécessairement, des négociations auront lieu, le Président l’a dit lui-même lors de notre échange jeudi dernier.

Mais alors ne perdons pas une minute ! Car chaque heure, chaque jour, chaque semaine apporte sont lot de morts et de destructions.

Puisque l’issue est connue, pourquoi attendre des centaines de milliers de morts supplémentaires avant de mettre un terme au conflit ?

Notre seule obsession devrait être de tout mettre en œuvre pour trouver les chemins d’un cessez-le-feu, d’une négociation garantissant la sécurité collective des pays d’Europe, de l’Atlantique à l’Oural.

Toutes les voies diplomatiques n’ont pas été exploitées, loin de là. La Chine, le Brésil, l’Inde ou encore l’Afrique du Sud ont déjà fait des propositions. Vendredi, le président Erdogan indiquait que la Turquie était prête à accueillir un sommet Russie-Ukraine. La Russie elle-même se dit prête à un cessez-le-feu, comme nous l’a indiqué le président de la République.

La diplomatie, ce n’est pas de savoir discuter uniquement avec ses amis. C’est aussi avoir le courage de chercher des solutions politiques plutôt que de bomber le torse et d’endosser ses habits militaires !

Enfin, œuvrer à une issue diplomatique et rapide à la guerre n’est pas faire injure à l’Ukraine. Le peuple ukrainien, lui aussi, aspire à la paix, à la sécurité. C’est un peuple courageux, résistant. Garantissons-lui d’être à ses côtés, de faire respecter sa souveraineté comme les résolutions de l’ONU, sous l’égide de l’ONU et si besoin de casques bleus, comme l’histoire l’a déjà fait.

Pour y travailler, nous appelons à la mise en place d’une conférence sur la sécurité collective des pays européens. Ce n'est bien sûr pas à nous de proposer des solutions précises, elles émergeront dans le cadre d'une négociation durant laquelle tous les éléments devront être mis sur la table.

Oui, la France a une voix forte à porter.

J’ajouterai ici, vous me le permettrez, que la crédibilité de la France comme de l’Union européenne est aussi liée à nos actes concernant la Palestine. Car il ne peut y avoir deux poids et deux mesures en matière de droit international, de respect des résolutions de l’ONU et dans la dénonciation des crimes, comme celui subi par le peuple palestinien à Gaza et en Cisjordanie. Que la France reconnaisse la Palestine dans ses frontières de 1967, comme me l’a encore demandé le Premier ministre palestinien rencontré mardi dernier à Ramallah, serait un acte politique fort qui entraînerait d’autres pays dans ce choix.

Concernant l’aide à l’Ukraine: Oui la France doit encore aider l’Ukraine. Mais pas seulement en lui donnant des armes. Je pense à la solidarité concrète et je salue l’accueil de familles ukrainiennes en France, auquel les maires et les élus communistes ont participé pleinement – et nous en sommes fiers .

Mais je pense aussi à l’aide financière qu’apporte l’Union européenne. Et là, permettez-moi de dénoncer l’hypocrisie de l’Union européenne ! L’aide d’un montant de 18 milliards d’euros annoncée par l’Union européenne en novembre 2022 est en réalité un cadeau empoisonné, puisqu’elle est versée sous forme de prêts à rembourser avec intérêts !

Vous ne pouvez pas vous empêcher d’être libéral et de vouloir gagner de l’argent sur leur dos. Vous devriez avoir honte !

Pour nous, aider l’Ukraine, c’est prêter à taux 0% et ce ne pas contribuer à un endettement ravageur.

Au bout du compte, ce seront les travailleurs ukrainiens qui paieront l’addition, avec des salaires en baisse, une précarisation des condition de travail, des services publics démantelés…

Le peuple est toujours en première ligne lorsque gronde le fracas de la guerre. C’est pourquoi nous devons tout faire pour l’éteindre.

C’est encore possible et nous, députés GDR et communistes, ne cesserons jamais d‘œuvrer pour empêcher la guerre totale, généralisée.

Le 21ème siècle ne doit pas être celui d’une troisième guerre mondiale. Jusqu’à la dernière minute, nous nous y engagerons.

Dans le dernier discours de sa vie, prononcé le 25 juillet 1914 à Lyon, cinq jours avant d’être assassiné, quelques jours avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale, Jean Jaurès y croyait encore et disait :« J’espère encore, malgré tout qu’en raison de l’énormité du désastre dont nous sommes menacés, à la dernière minute, les gouvernements se ressaisiront et que nous n’aurons pas à frémir d’horreur à la pensée du cataclysme qu’entraînerait aujourd’hui pour les hommes une guerre européenne. »

Ne tuez pas une deuxième fois Jean Jaurès.

Et comme lui, nous appelons le gouvernement à se ressaisir.

Voilà pourquoi nous nous prononçons, à l’unanimité de notre groupe, contre cet accord, qui nous engage pour dix ans, avec des objectifs imprécis et dans des termes flous. Un accord, qui ne trace aucune ligne rouge, aucune perspective de paix et participe à l’escalade militaire.

Le vote d’aujourd’hui sera inscrit dans l’histoire car il peut précipiter notre pays dans la guerre.

Encore une fois, malheureusement, une grande majorité, dans cette Assemblée, s’apprête à voter pour une telle déclaration, un tel accord, un tel traité. Vous vous apprêtez à voter très majoritairement pour, alors que les Français sont très majoritairement contre.

Alors, encore une fois, les communiste, fidèles à leurs convictions, et comme ils toujours fait dans l’histoire de notre pays, seront ceux qui voteront contre la guerre et pour la paix, pour une solution politique, pour une solution diplomatique.

Encore une fois, nous serons fidèles à nos convictions et nous resterons aux côtés des Français qui aujourd’hui ne souhaitent pas entrer en guerre contre la Russie.

 

vendredi 15 mars 2024

Déclaration du Gouvernement relative à l’accord de sécurité franco-ukrainien et à la situation en Ukraine

Il y a quasiment deux ans jour pour jour, je dénonçais ici devant vous, au nom de mon groupe et des députés communistes, l’offensive criminelle lancée par le nationaliste Poutine, en violation de toutes les règles du droit international.
Dans cette guerre, il y a bien un agresseur, Vladimir Poutine, et un pays en situation de légitime défense, l’Ukraine, qu’il faut soutenir. C’est pourquoi nous avons voté en novembre 2022 la résolution soutenant l’Ukraine et condamnant la guerre lancée par la Russie. Depuis, notre position n’a pas changé : non, la Russie ne doit pas gagner la guerre et oui, il faut donner à l’Ukraine de se défendre, comme nous l’avons fait jusqu’à maintenant.

Ce soutien doit être apporté dans le cadre défini par la France il y a deux ans, lequel comporte des lignes rouges dont le franchissement provoquerait l’entrée en guerre de notre pays contre la Russie et ses alliés.
Les déclarations va-t-en-guerre du Président de la République au sujet de l’envoi de troupes françaises en Ukraine, qui ne mettent aucune limite au soutien à ce pays en guerre et qui ont été confirmées lors de la réunion des chefs de partis au palais de l’Élysée, ont fortement choqué nos compatriotes.

La perspective de la guerre et son cortège de souffrances sont brutalement entrés dans chaque foyer de France, dans chaque famille.
Avec gravité je l’affirme : la France doit porter une autre voix que celle de la guerre, quand celle-ci a provoqué la mort d’un demi-million de personnes et semé le chaos aux portes de l’Europe. C’est une véritable boucherie et au nom de l’humanité, nous devons tout mettre en œuvre pour qu’elle s’arrête, et au plus vite.
Dans quelques semaines, nous célébrerons le 80e anniversaire du débarquement en Normandie. Avec d’autres, notre pays a subi dans sa chair le martyre de deux conflits mondiaux qui se sont soldés par des dizaines de millions de morts. Notre responsabilité vis-à-vis des jeunes générations est aujourd’hui plus lourde que jamais. Pendant des décennies, nous leur avons fait haut et fort cette promesse : « Plus jamais ça ! ». Faisons respecter cet engagement, celui sur lequel est née l’Union européenne ! Rien ne justifie que nous lancions notre jeunesse dans une nouvelle folie meurtrière, de surcroît placée sous la menace du feu nucléaire.
Voulons-nous la destruction de notre civilisation ? C’est pourtant bien ce qui en jeu quand nous entrons dans une escalade guerrière dont nul ne prétendrait deviner l’issue. Tout doit être fait pour éviter une telle escalade, mais ce n’est pas l’accord que vous avez signé le 16 février avec l’Ukraine qui nous conduira vers l’apaisement. Au contraire, il risque de nous entraîner plus avant encore dans le conflit. Il prévoit d’intégrer l’Ukraine dans l’Union européenne et dans l’Otan, nous y sommes d’autant plus opposés que ces intégrations seront au cœur des négociations à venir entre les belligérants.
J’ajoute que l’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne mettra à mal notre agriculture et notre industrie, en provoquant un dumping social que les Français rejettent massivement. Comme eux, nous rejetons aussi cette idée.
J’en viens au volet de l’accord relatif à la coopération militaire de défense, qualifié de « non exhaustif », c’est-à-dire dépourvu de toute limite, comme l’a dit lui-même le Président de la République. Comment peut-on signer ainsi un chèque en blanc à un État en guerre ?
Nous le savons tous ici : des négociations auront nécessairement lieu un jour, Emmanuel Macron nous l’a lui-même dit jeudi dernier. Dans ce cas, ne perdons pas une minute : chaque heure, chaque jour, chaque semaine apporte son lot de morts et de destructions. Si l’issue est connue, pourquoi attendre que le bilan de la guerre s’alourdisse de centaines de milliers de morts supplémentaires avant de mettre un terme à celle-ci ? Notre obsession devrait être de tout mettre en œuvre pour trouver le chemin menant à un cessez-le-feu, à une négociation garantissant la sécurité collective des pays d’Europe, de l’Atlantique à l’Oural !
Toutes les voies diplomatiques n’ont pas été explorées, loin de là. Le Brésil, l’Inde, la Chine ou encore l’Afrique du Sud ont fait des propositions et vendredi, le président Erdo ?an indiquait que la Turquie était disposée à accueillir un sommet Russie-Ukraine. La Russie elle-même ne s’est-elle pas déclarée prête à signer un accord de cessez-le-feu, comme nous l’a indiqué le Président de la République ? La diplomatie, ce n’est pas uniquement savoir discuter avec ses amis, c’est aussi avoir le courage de chercher des solutions politiques plutôt que de bomber le torse et d’endosser ses habits militaires !
Œuvrer à une issue diplomatique et rapide à la guerre, ce n’est pas faire injure à l’Ukraine, dont le peuple, courageux et résistant, aspire lui aussi à la paix et à la sécurité. Garantissons-lui de nous trouver à ses côtés pour faire respecter sa souveraineté comme les résolutions de l’ONU, sous l’égide de l’ONU et, si besoin, de casques bleus : notre histoire a déjà connu de telles solutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)
Pour travailler à cette paix, nous appelons à l’organisation d’une conférence sur la sécurité collective des pays européens.

Il ne nous appartient pas de proposer des solutions très précises, puisque celles-ci émergeront dans le cadre d’une négociation durant laquelle tous les éléments de la situation devront être examinés.
Oui, la France a une voix forte à porter. J’ajouterai que la crédibilité de la France, comme celle de l’Union européenne, est liée à la manière dont elle agit vis-à-vis d’autres conflits, comme celui qui a lieu en Palestine. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

En matière de droit international, de respect des résolutions de l’ONU et de dénonciation de crimes comme celui subi par le peuple palestinien à Gaza et en Cisjordanie, il ne saurait y avoir deux poids, de mesures. Que la France reconnaisse la Palestine dans ses frontières de 1967, comme me l’a encore demandé le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, rencontré mardi dernier à Ramallah, serait un acte politique fort, dont s’inspireraient d’autres pays.
Oui, la France doit encore aider l’Ukraine, mais pas seulement en lui donnant des armes.

Je pense à la solidarité concrète et je salue l’accueil des familles ukrainiennes en France, auquel les maires et les élus communistes ont participé pleinement – nous en sommes fiers mais je pense aussi à l’aide financière qu’apporte l’Union européenne, dont vous me permettrez de dénoncer l’hypocrisie. L’aide de 18 milliards d’euros qu’elle a promis en novembre 2022 s’est révélée être un cadeau empoisonné : elle est versée sous forme de prêt à rembourser, avec intérêts bancaires ! Les libéraux, qui ne peuvent s’empêcher de rechercher leur profit sur le dos des Ukrainiens, devraient avoir honte ! Pour nous, aider l’Ukraine, c’est lui prêter à taux zéro, ce n’est pas contribuer à un endettement ravageur.
En définitive, ce sont les travailleurs ukrainiens qui paieront l’addition, avec des salaires en baisse, une précarisation des conditions de travail et des services publics démantelés.
Le peuple est toujours en première ligne lorsque gronde le fracas de la guerre. C’est pourquoi nous devons tout faire pour l’éteindre, ce qui est encore possible. Nous, députés du groupe GDR et communistes, ne cesserons jamais d’œuvrer pour empêcher la guerre totale, généralisée. Le XXIe siècle ne doit pas être celui d’une troisième guerre mondiale et cet engagement, nous le tiendrons jusqu’à la dernière minute.

Dans le dernier discours de sa vie, prononcé le 25 juillet 1914 à Lyon, cinq jours avant d’être assassiné, Jean Jaurès y croyait encore et disait : « J’espère encore, malgré tout, qu’en raison de l’énormité du désastre dont nous sommes menacés, à la dernière minute, les gouvernements se ressaisiront et que nous n’aurons pas à frémir d’horreur à la pensée du cataclysme qu’entraînerait aujourd’hui pour les hommes une guerre européenne. »
Ne tuez pas une seconde fois Jaurès ! (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Comme lui, nous appelons le Gouvernement à se ressaisir. Voilà pourquoi notre groupe votera à l’unanimité contre cet accord qui nous engage pour dix ans, avec des objectifs imprécis et en des termes flous. Cet accord ne trace aucune ligne rouge ni aucune perspective de paix, et participe à l’escalade militaire.
Le vote d’aujourd’hui s’inscrira dans l’histoire, car il peut précipiter notre pays dans la guerre. Encore une fois, malheureusement, une grande majorité de députés s’apprêtent à voter pour une telle déclaration, un tel accord, un tel traité alors qu’une grande majorité de Français sont contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)

Encore une fois, les députés du groupe communiste, fidèles à leurs convictions, seront ceux qui voteront contre la guerre et pour la paix, pour une solution politique, pour une solution diplomatique, comme ils l’ont toujours fait dans l’histoire de notre pays. Encore une fois, nous serons fidèles à nos convictions et nous resterons aux côtés des Français qui ne souhaitent pas entrer en guerre contre la Russie. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

 

Pt Sénat gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection & Pt Org modifiant la loi organique di 23 07 2010 Art 13-5 de la Constitution

Je suis, vous le savez, favorable à la relance de la filière nucléaire – pas par idéologie et certainement pas par amour, mais parce que je veux préserver le climat. J’y suis favorable parce que notre pays a besoin d’une énergie sûre, pilotable et décarbonée, garante de notre souveraineté énergétique et industrielle. Je le suis parce que j’ai confiance dans notre sûreté nucléaire et dans les personnels qui réalisent un travail exceptionnel, confiance dans le système dual qui, depuis plus de quarante ans, permet à la France d’être le pays le plus nucléarisé au monde sans risquer d’incident. Je suis pronucléaire parce que j’ai confiance dans l’ASN et l’IRSN.

Notre pays a construit, du plan Messmer à aujourd’hui, un modèle unique qui s’est inspiré des catastrophes du passé et du présent, avec un haut degré d’exigence dans le traitement des retours d’expérience. Ce modèle a, dès l’origine, cherché à maintenir une séparation étanche entre l’expertise et la décision, en préservant deux entités – non par goût du doublon ou de la dépense budgétaire, mais parce que « démontrer la sûreté, c’est confronter des doutes ».

Ce modèle, organisé autour de l’ASN et de l’IRSN, a su au fil des années intégrer la participation du public et garantir la transparence de l’information, notamment grâce aux commissions locales d’information (CLI), dans lesquelles j’ai siégé pendant de nombreuses années. Il a été à la pointe de la recherche scientifique, questionnant les pratiques de l’exploitant, allant plus loin que les recommandations usuelles et permettant de débattre sereinement, dans un échange démocratique, de la place d’une telle technologie et des risques que nous sommes prêts à prendre. Ce modèle, on nous l’envie, ainsi que cela a déjà été dit. Personne, aucune institution française ou internationale, de la Cour des comptes aux comités les plus spécialisés, n’a remis en cause son existence ou son efficacité.

Pourtant, depuis un an désormais, nous assistons à un triste feuilleton, qu’on pourrait qualifier de comique si le sujet n’était pas si sérieux. Nous discutons d’un projet de réforme sans motifs ni justifications, décidé par un fait du Prince dans le silence du Conseil de politique nucléaire. Un projet de réforme géante que ni le rapporteur ni le ministre – que je ne souhaite d’ailleurs pas blâmer – ne savent réellement justifier. Aux « pourquoi ? » ne répondent que des éléments de langage peu convaincus et peu convaincants.

Lorsque le projet de réforme est apparu, par le biais d’un amendement, pas même une étude d’impact ne l’accompagnait. Nous l’avons rejeté. Et maintenant, alors que le rapport à l’origine de cette réforme reste secret, opaque, nous devrions l’accepter ? On nous demande de voter à l’aveugle, de signer un chèque en blanc ; de voter une réforme contestée par tous, des anciens présidents de l’Opecst aux organisations syndicales des deux organismes concernés en passant par des associations de consommateurs ; de voter une réforme et de céder au chantage à la relance du nucléaire ; de voter pour aller plus vite, pour être plus efficace.

Chez vous, les libéraux, amoureux de l’agilité disruptive, casser ce qui marche pour aller plus vite, pour uniformiser, ressemble à une obsession pathologique.

Casser notre modèle de sûreté en pleine relance de la filière nucléaire, alors que la charge de travail est inédite pour les personnels et que les défis de recrutement font peser sur toute l’industrie de l’énergie une pression sans précédent. Casser, enfin, en pleine période de confiance du pays dans l’énergie nucléaire, un modèle qui rassure et dont nos concitoyens savent qu’il n’est pas synonyme de complaisance.

Il y a dans cette réforme tous les ingrédients du fiasco : un manque de travail, une absence de justifications, des motifs de désorganisation des personnels responsables de notre sécurité collective et, surtout, l’envie, pour le chef de l’État, de transformer notre système de sûreté nucléaire en un grand accompagnateur du business de l’énergie. Il y a aussi des intentions inavouables d’économies budgétaires. Les ressources de l’IRSN ont baissé de près de 10 % en dix ans et la fusion avec l’ASN pourrait faire courir le risque de nouvelles coupes. Cela serait dangereux, au moment où l’IRSN connaît une vague de départs et où l’ASN peine à recruter.

Je n’irai pas jusqu’à dire que vous êtes fous de défendre une telle réforme à un tel moment. Je dirai simplement que vous êtes inconscients. Désorganiser le système actuel ne manquerait pas d’accroître les retards dans l’instruction des dossiers, le risque de passer à côté de failles et le sentiment antinucléaire dans le pays.

Monsieur le ministre – j’en terminerai par là pour écourter mon propos –, vous devriez vous inquiéter quand des personnes attachées à la relance de la filière nucléaire, comme Saint-Huile ou moi-même, vous disent leurs doutes sur l’efficacité de cette réforme. Écoutez ceux qui doutent : la sûreté a besoin de dualité, de confrontations, de débats. En matière nucléaire, la démontrer, c’est douter, et non être assertif. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

 

jeudi 14 mars 2024

Reprise de Casino : les syndicats font appel du plan de sauvegarde accélérée

Les représentants du personnel de Casino et l’intersyndicale contestent en justice la validité de la reprise du groupe et dénoncent « une catastrophe sociale ». Lundi 4 mars ils ont fait appel de la décision rendue par le tribunal de commerce le 26 février dernier.

Réunis dans les locaux de Technologia Juris, les représentants du CSE Central (CSEC) de la société Distribution Casino France (DCF) et l’intersyndicale du groupe Casino ont annoncé lundi 4 mars dans la soirée qu’ils faisaient appel de la décision rendue par le tribunal de commerce le 26 février dernier. Ce jugement, intervenu dans le contexte de la prise en main du Groupe Casino, surendetté à hauteur de 6 milliards d’euros après trente ans de présidence de Jean-Charles Naouri, par un « consortium » de repreneurs, notamment les milliardaires Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière, adossés au fonds d’investissement Attestor, a validé le plan de sauvegarde accéléré censé protéger l’activité et l’emploi.

Ce lundi 4 mars, lors d’une conférence de presse en présence de leurs avocats, les syndicats considèrent qu’il n’en est rien. Ce rachat, prévu pour le 27 mars, doit surtout s’accompagner d’une vente à la découpe de Casino avec la cession de 288 magasins répartis entre Intermarché (164), Auchan (98) et Carrefour (26).

Un plan jugé illégal

C’est tout d’abord la légalité du plan qui est mise en cause. « Nous avons le sentiment que le tribunal a été trompé », regrette maître Mathieu Boisset, indiquant qu’il ne serait pas conforme aux annonces faites aux représentants du personnel lors d’une réunion du comité social et économique central (CSEC) datant du 12 octobre 2023. La direction de DCF (Distribution Casino France, filiale regroupant tous les supermarchés) avait alors indiqué que, sous la base de résultats financiers du troisième trimestre 2023, le plan ne concernerait que la restructuration financière et qu’il exclurait la possibilité de licenciements. Pourtant, le 26 octobre, le lendemain du jugement d’ouverture de la sauvegarde accélérée, elle présentait une situation économique et financière tout autre. Le tribunal de commerce eut pour justification de la part du groupe qu’il n’avait connaissance de ses comptes que quatre fois par an.

« Une catastrophe sociale »

S’appuyant sur une réalité financière critique, la direction de Casino a alors pu présenter la reprise comme une nécessité, quitte à s’abstenir de tout volet social. Cette nouvelle entorse à la loi inquiète fortement les syndicats. « Non seulement ce plan n’est pas valable, mais il serait une catastrophe sociale », estiment-ils. En plus de ne garantir aucune sauvegarde de l’activité – « le groupe sera en cessation de paiements en 2027 » d’après leur communiqué – le sort des 10 entrepôts, des sièges de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) et de Saint-Etienne (Loire) mais aussi des 26 magasins qui ne seraient pas repris par Intermarché ni Auchan n’est aucunement réglé.

Cela équivaudrait selon eux à 6 000 emplois qui risquent d’être touchés, faute d’une communication claire de la part de leur direction. Cette dernière agite même la menace de la liquidation financière en cas de rejet du plan de sauvegarde. Un leurre selon l’intersyndicale qui demande au groupe d’assumer tout échec potentiel.

Pour l’heure, cet appel n’est pas suspensif et la cour d’appel devrait rendre sa décision dans quelques mois, après la date de reprise en main. À moins que le parquet, qui avait émis un avis défavorable lors de l’audience, fasse de même. Mais il ne lui reste que trois jours pour agir.

 

Echirolles. Deux rencontres autour des 120 ans de l’Humanité


 

Quotidien papier, journal numérique… l’Humanité fête cette année son cent-vingtième anniversaire. Un événement marqué par deux rencontres, les 16 et 19 mars prochains, à Echirolles.

Jean Jaurès reconnaîtrait-il le journal qu’il a fondé en 1904 ? Sûrement. Depuis 120 ans, l’Humanité est restée fidèle aux combats qui ont présidé à sa création. 120 ans au cours desquels l’Humanité est le journal qui a pris position dans tous les combats pour la paix, les luttes anticoloniales, les grands combats émancipa­teurs, durant les heures les plus sombres de notre histoire comme lors des grandes victoires populaires.

Un journal qui a évolué avec la société. Qui a su diversifier ses formes de publication et qui est aujourd’hui un groupe multimédia. C’est cette continuité dans la modernité que donneront à voir deux débats publics, les 16 et 19 mars prochains.

Le 16 mars à 17 heures, le rendez-vous est donné sur le thème « La presse progressiste à l’heure du numérique ». Il aura lieu à la salle polyvalente Pablo Picasso, 4 Rue Pablo Picasso, à Échirolles, avec la participation de Cyprien Caddeo, journaliste à l’Humanité et chroniqueur sur YouTube. Débat suivi d’un repas et d’une soirée festive.

Le 19 mars, c’est avec Patrick Le Hyaric que l’on pourra débattre de ces 120 ans d’histoire du journal. Patrick Le Hyaric a été directeur de l’Humanité de 2000 à 2020. La rencontre aura lieu à 18h30 à l’Institut de la communication et des médias, 11 av du 8 mai 1945 à Echirolles.

Deux soirées pour évoquer l’histoire et l’actualité d’une presse singulière qui a toujours marqué son époque.

Infos pratiques

16 mars :

17h : débat « La presse progressiste à l’heure du numérique » avec Cyprien Caddeo, journaliste à l’Humanité, Chroniqueur sur YouTube. Salle polyvalente Pablo Picasso, 4 Rue Pablo Picasso, Échirolles. Ligne C7 arrêt Colonel Mahès / ligne 16 arrêt Pablo Picasso.

19h : Repas convivial… puis soirée festive, pour les plus motivé·e·s ! Menu à 15 €. Crudités, soupe de courge, charcuterie. Poulet basquaise. Bar à glaces. Inscriptions : contact@travailleur-alpin.fr ou 04 76 87 70 61.

Soirée organisée par le Travailleur alpin et la Société des lecteurs et lectrices de l’Humanité.

19 mars :

18h30, à l’Institut de la communication des médias, amphi Bernard Montergnole, 11 av du 8 mai 1945, Échirolles. Arrêt tram : La Rampe, ligne A.

Soirée organisée par la Société des lecteurs et lectrices de l’Humanité.

mercredi 13 mars 2024

Nucléaire, transport, forêt… La Cour des comptes fustige le manque d’adaptation de la France au changement climatique

Dans son rapport annuel publié mardi 12 mars, la Cour des comptes s’est intéressée à l’action publique en faveur de l’adaptation au changement climatique. Son constat est sans appel : la France n’est pas préparée.

Après le rapport de l’Agence Européenne pour l’Environnement, qui estimait que les politiques publiques européennes n’étaient pas assez efficaces et ambitieuses pour faire face aux risques liés au réchauffement climatique, c’est aujourd’hui la Cour des comptes qui pointe le manque de préparation de la France. « Les travaux des juridictions financières mettent en évidence l’ampleur des progrès à réaliser », écrivent notamment les magistrats dans un document sur « l’action publique en faveur de l’adaptation au changement climatique », publié mardi 12 mars.

Logements, aménagement des espaces urbains, gestion du littoral, santé, finances, agriculture… : la Cour des comptes brasse de nombreux sujets en y apposant systématiquement des pistes de solutions et d’améliorations. C’est la première fois que cette thématique de l’adaptation fait l’objet d’un rapport spécifique de la Cour. Si la juridiction financière se félicite d’une « prise de conscience » de l’urgence, elle demande à l’État de jouer plus clairement son rôle de stratège et de mieux chiffrer les efforts budgétaires nécessaires.

Logements, transports, banques, érosion du littoral…

Le parc de logements en France est « très majoritairement inadapté » aux risques liés au changement climatique, comme la généralisation rapide des pics de chaleur, constate la Cour des comptes, qui recommande de faire de l’adaptation une « priorité publique » en élaborant des scénarios chiffrés. Face à la hausse des températures et à la multiplication des canicules, les villes françaises ont adopté tardivement des stratégies d’action qui restent partielles et à l’efficacité limitée, relève également la Cour, qui recommande de définir des « étapes à franchir » et des « objectifs à atteindre », rapporte l’Agence France-Presse (AFP).

Côté transport, la Cour des comptes regrette que la SNCF, et plus particulièrement le gestionnaire d’infrastructures SNCF Réseau, « ne dispose pas des outils nécessaires à l’identification et à la mesure des coûts générés par le changement climatique » et l’exhorte à y remédier. D’autre part, la Cour demande des investissements supplémentaires pour adapter les 18 centrales nucléaires, les barrages et le réseau de distribution d’électricité français au réchauffement. Elle juge également « insuffisant » le soutien public à la recherche sur l’adaptation de la forêt.

Les sociétés financières françaises, qui actualisent régulièrement leurs politiques de lutte contre le réchauffement climatique, affichent des objectifs « peu quantifiables, peu suivis et peu comparables », regrette également la Cour des comptes. La lutte contre l’érosion côtière, qui ronge 20 % des côtes françaises, doit « sortir de la logique d’expérimentation » pour améliorer la connaissance du risque et planifier les relocalisations de logements et d’activités menacés, observe la Cour des comptes, qui propose la création d’un mécanisme de financement, rapporte l’AFP.

Austérité vs lutte contre le changement climatique

La Cour regrette enfin « l’absence de chiffrages exhaustifs et cohérents pour l’ensemble des acteurs publics » des dépenses qui seront nécessaires pour adapter la France au changement climatique. « L’évaluation des coûts actuels et futurs de l’adaptation est lacunaire, voire inexistante, faute de données suffisantes, mais également parfois d’objectifs clairs », déplorent les magistrats, sommant l’État de jouer « correctement son rôle de stratège ».

Par ailleurs, Pierre Moscovici, le premier président de la Cour des comptes, appelle à toujours plus d’austérité, notamment en demandant un plan d’économies massif et inédit sur trois ans pour ramener le déficit sous les 3 % du PIB en 2027. Ces positions s’inscrivent dans la droite ligne des déclarations du ministre de l’Économie Bruno Le Maire, qui, après avoir annoncé 10 milliards d’euros d’économie, a affirmé aux côtés de son ministre délégué aux Comptes publics devant la commission des Finances de l’Assemblée, la nécessité de doubler la mise, avec jusqu’à 20 milliards d’économies en 2025. Déplorer le manque d’adaptation et d’investissement dans la lutte contre le changement climatique tout en exigeant des mesures d’austérité toujours plus dures, voilà une nouvelle pirouette des tenants de la « rigueur », jamais à une contradiction près.

 

La réindustrialisation française selon Macron : un mirage

Par leurs différentes interventions ces derniers mois, le président de la République et Gabriel Attal considèrent que la politique de l’offre menée depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron fonctionne. Or, il n'en est rien, pire on assiste à un transfert des richesses du travail vers le capital.

Désindustrialisation de la France : de graves conséquences

La désindustrialisation du pays risque de produire des effets économiques, sociaux et politiques délétères :

  • le secteur industriel présente des gains de productivité plus importants et concentre l’essentiel de la dépense intérieure de recherche et développement des firmes ; 
  • les salaires versés y sont en moyenne plus élevés ; 
  • les emplois industriels sont moins précaires que les emplois de services ;
  •  l’industrie a un effet d’entraînement important sur le reste de l’économie et, in fine, un effet multiplicateur fort sur l’emploi (et ce également au niveau local); 
  • le secteur industriel est aussi le secteur exportateur, qui conditionne l’évolution de la balance commerciale.

Alors que dans son discours du 11 mai 2023 sur la politique industrielle, le président de la République déclarait "qu’on […] recrée de manière nette des usines" et que dans sa déclaration de politique générale du 30 janvier 2024, Gabriel Attal affirmait quant à lui que "nous avons engagé une action résolue pour la souveraineté économique avec pour la première fois le retour de l’industrie sur notre sol. " considérant ainsi que la politique de l’offre menée depuis 2017 fonctionne puisqu’elle amorcerait la réindustrialisation de l’économie française, force est de constater qu'il n'en est rien.

Les chercheurs considèrent qu’une économie se désindustrialise lorsque la part de l’industrie manufacturière dans la valeur ajoutée brute (comparée aux autres branches de l'économie) et la part de l’emploi manufacturier se réduisent.

Or, tous les travaux menés par les économistes mettent en évidence une désindustrialisation accélérée de la France.

Entre 1974 et 2022 on note une perte de plus de 2,2 millions d'emplois industriels.

Des créations d'emplois industriels en trompe l'œil

En s’appuyant sur les données collectées par le site de veille et d’information économique Trendeo, le gouvernement affirme qu’environ 300 créations nettes de sites industriels ont eu lieu sur le territoire national depuis 2017. 

Par ailleurs, à partir des données de l’Insee, ils montrent que 100 000 emplois industriels ont été créés.

Le gouvernement voit dans ces résultats le succès de la politique de l’offre :

  • les politiques d’exonérations de cotisations sociales
  • la baisse de l’impôt sur les sociétés et des impôts de production,
  • la loi Pacte pour les entreprises

Selon le gouvernement, en renforçant la compétitivité de l’économie française et en améliorant son attractivité, ces politiques auraient permis d’amorcer une relocalisation de la production manufacturière, et des emplois qui lui sont associés, sur le territoire national.

Or, les chiffres contredisent le discours du gouvernement et même les font mentir.

Selon les données de l'Insee, on constate bien la création d'emplois industriels entre le 3e trimestre 2017 (début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron) et le troisième trimestre 2023. Néanmoins, la production manufacturière en 2023 est inférieure de 2 % à son niveau de 2017.

Alors que la production manufacturière augmentait de 1,1 % en moyenne par an entre 1999 et 2017, elle recule désormais de 0,2 % par an depuis le début du premier quinquennat !

La productivité du travail a baissé. Les créations d’emplois industriels ne se sont donc pas accompagnées d’une création de richesse équivalente en contrepartie.

En d’autres termes, ces créations d'emplois sont seulement dues au fait que la même production est désormais réalisée en utilisant davantage de main d’œuvre. On produit aujourd’hui la même chose qu’en 2017 dans l’industrie manufacturière, mais on a besoin de plus de travailleuses et de travailleurs pour le faire 

Baisse de la productivité du travail : les conséquences des réformes néolibérales depuis 2017

D'après les économistes, les gains de productivité sont en moyenne plus élevés dans les économies ayant des marchés du travail régulés et coordonnés plutôt que dans celles ayant des marchés du travail dérégulés et flexibles comme c'est devenu le cas en France.

De plus, le ralentissement constaté de la croissance des salaires réels n'incite pas les entreprises à investir dans le progrès technique mais au contraire à augmenter leurs profits.

Le taux de marge des entreprises de l'industrie a fortement augmenté : il est supérieur de 11 % au premier trimestre 2023 par rapport au troisième trimestre 2017 alors que dans le même temps, la part des salaires est inférieure de 2 %.

La hausse des profits s'est faite par un transfert de richesse du travail vers le capital.