jeudi 1 septembre 2011

En finir avec les croyances et les préjugés stigmatisants sur les Roms

Dans cette tribune publiée dans Le Monde du 12 août 2011, Philippe Rodier, médecin, responsable d’une mission sur les Roms au sein de Médecins du monde à Marseille, refuse l’ethnicisation du problème. Ce peuple rom, ressenti comme une évidence, est une mosaïque d’éléments reliés entre eux par un fonds culturel mais surtout unis dans la répulsion collective qu’ils suscitent.
Les Roms sont, comme tous citoyens, des hommes ou des femmes que l’on doit définir par leur individualité et leur nationalité (française, roumaine, bulgare...). Cela suffit pour affirmer qu’il convient, vis-à-vis de ces Roms, d’appliquer le droit commun, à l’exclusion de tout autre.

Les Roms sont d’abord des Européens migrants [1]

La présence des familles roms à Marseille date du début des années 2000. Il fallut attendre l’année deux mille cinq pour que, sous la pression des associations et des riverains, les pouvoirs publics commencent à s’émouvoir. Les premières réactions furent plaintives comme : "Pourquoi diable sont-ils venus ?", ou craintives comme : "Surtout ne rien faire qui puisse provoquer un appel d’air !"
Certains élus évoquaient la responsabilité de l’Europe, d’autres estimaient la distance culturelle dissuasive, mais la résultante fût que tous s’accordèrent à ne rien faire. Le temps passant, de la droite à la gauche de l’échiquier politique, la "sécurité" fût reconnue comme la seule et unique dimension de cette problématique. Alors que nous pointions, avec d’autres, l’impact humain, sanitaire et légal de ce phénomène, la pensée unique, concernant les Roms pouvait dès lors s’énoncer ainsi : "Les Roms sont synonymes de trouble à l’ordre public".
A cette évidence admise par presque tous, la réponse politique fut une réponse de type sécuritaire à l’exclusion de toute autre réponse. Depuis cinq ans, le rouleau compresseur de la répression s’acharne. Il a tenté de dissuader les familles, mais les Roms, cabossés, maltraités et persécutés sont restés. Aujourd’hui, force est de reconnaitre que l’approche sécuritaire, tant vantée et si riche de ses promesses "cosmétiques" sur la ville, n’a rien donné. Pourquoi ? La question mérite d’être posée. Face à ce que nous percevons, nous, chez Médecins du monde, comme une urgence humanitaire avant tout, il est possible de concevoir deux approches : une réaliste, et l’autre chimérique.
La chimère a été illustrée par le discours de Grenoble, le 30 juillet 2010, lorsque le chef de l’Etat fit un amalgame surprenant entre les familles migrantes roumaines et bulgares et les familles tsiganes françaises. Au motif de dénoncer à la vindicte populaire les responsables d’un sentiment d’insécurité générale, les Roms, ensemble, furent désignés comme coupables. Au-delà de la confusion grossière qui mettait au fond du même sac, des citoyens français tsiganes nomades et des Roumains et Bulgares sédentaires, ce sont des familles fragiles, précaires et disparates, que l’on accablait d’une responsabilité collective et d’une punition exemplaire. Nous ne parlerons pas ici de l’aspect scandaleux de cette annonce, ni de sa nature, mais de son objet, les Roms. Les notions de Rom, de communauté rom ou de peuple rom méritent d’être éclaircies.
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