jeudi 20 octobre 2011

André Grimaldi :« Santé, Sécurité sociale, hôpital, nous devons tout remettre à plat »

Par Elodie Bécu
Privatisation rampante et logiques mercantiles, fermeture d’hôpitaux, politique du médicament incohérente, augmentation des déserts médicaux… Où va notre système de santé ? Pour André Grimaldi, professeur de diabétologie à la Pitié-Salpêtrière (Paris), il est urgent de tout remette à plat et de revenir aux valeurs de solidarité et d’égalité fondatrices de la Sécurité sociale en 1945. Il est co-auteur du Manifeste pour une santé égalitaire et solidaire, signé par 123 personnalités du monde médical et de la société civile. Entretien.
Basta ! : Êtes-vous inquiet pour le système de santé français ?
André Grimaldi : Un vrai débat est nécessaire sur notre système de santé, qui reste globalement bon, mais devient de plus en plus inégalitaire. Nous assistons actuellement à un transfert continu des charges de la Sécurité sociale vers le privé : les mutuelles, les assurances privées et le reste à charge pour les patients. La Sécurité sociale se concentre sur les remboursements de soins pour les plus pauvres – la CMU – et les pathologies les plus graves. Elle se désengage des soins courants, remboursés à 50 %. Les patients sont contraints de prendre une assurance complémentaire, ce qui crée une double inégalité : les pauvres doivent y consacrer une part de leur revenu beaucoup plus élevée que les riches, et les personnes à risque, en particulier les personnes âgées, payent une surprime. 4 millions de Français n’ont pas de complémentaire santé ! Ce transfert sape progressivement les valeurs – la solidarité et l’égalité – sur lesquelles repose notre système. Ajoutons que les frais de gestion des mutuelles et assurances privées sont supérieures à 15 % de leur chiffre d’affaires, contre moins de 5 % pour la Sécu. Le transfert vers les assurances complémentaires accroît les inégalités et coûte plus cher !
Comment cela va-t-il évoluer dans les prochaines années ?
Lorsque les bien-portants et les plus riches constateront que la Sécu les rembourse peu tandis que leurs primes de mutuelle ne cessent d’augmenter, ils demanderont à sortir du système solidaire. Nous serions alors confrontés à une dérive à l’américaine avec une aide publique uniquement pour les plus pauvres et les plus malades. Une solidarité pour les plus pauvres devient très vite une pauvre solidarité ! Résultat : aux États-Unis, dans certains États, si vous êtes au chômage et que vous avez besoin d’une greffe d’organe, vous êtes fichu. Pour préserver le système, il faut que la solidarité bénéficie à tout le monde : l’équité doit s’exprimer par un prélèvement augmentant de façon progressive avec les revenus, tandis que l’égalité doit se traduire par une prestation de qualité égale pour tous, également remboursée.
Le déficit de la Sécurité sociale est important. Que proposez-vous pour maintenir un fonctionnement égalitaire dans cette situation budgétaire tendue ?
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