mardi 12 février 2013

« Cette affaire des rythmes scolaires  est une opération d’enfumage »

Derrière la réforme Peillon se cache un projet de société, et si les enseignants en grève défendent à raison leurs conditions de travail, ils combattent aussi pour une école plus égalitaire. Entretien avec José Tovar.
Regards.fr. Le jeudi 31 janvier, les enseignants étaient appelés à faire grève avec toute la fonction publique. Ils le seront de nouveau le 12 février sur les questions scolaires. Quel est leur état d’esprit ?
José Tovar. Les enseignants sont mal dans leur peau, mal dans leur métier. Depuis plus de cinq ans on a vu une accumulation de réformes à tous les niveaux, primaire et secondaire, sans que les enseignants n’aient été consultés sur leur nécessité ou leur pertinence, et le résultat de tout ça, c’est la déréglementation tous azimuts : plus personne ne maîtrise la cohérence d’un métier aux implications affectives très fortes ! Les enseignants sont sommés d « innover » et doivent improviser en permanence. Ce qui hier coulait de source, ne coule plus de source aujourd’hui. Par exemple, l’introduction des enseignements de soutien à l’école élémentaire a provoqué un bazar pas possible : horaires, durée, nombre d’élèves concernés  : rien n’était clairement et réellement conçu dans l’intérêt des élèves, tout pour la façade ! Durant ces dernières années, on a chargé la barque des programmes (une langue vivante obligatoire, l’informatique, des évaluations à répétition…) alors même que la durée totale d’enseignement diminuait ! Au collège, le passage d’un enseignement fondé sur les disciplines à un enseignement basé sur les compétences oblige les profs à réinventer leur métier alors même que leur formation initiale ne les y a pas préparés, qu’elle a même été supprimée pour les nouveaux recrutés (sans parler de la formation continue, toujours inexistante !). Au lycée, les réformes Chatel ont complètement désorganisé le fonctionnement antérieur : multiplication des options (au choix des élèves), des groupes disciplinaires ou de niveaux, suppressions d’enseignements, etc. Une partie grandissante des enseignements proposés se fait pratiquement « à la carte » : en dehors de quelques matières, les élèves d’une même classe ne sont plus jamais ensemble, ce sont les enseignants qui doivent gérer les effectifs ; l’accompagnement personnalisé censé apporter une aide aux élèves en difficulté plus ou moins lourde, mais passagère, est détourné pour permettre à certains profs de « boucler » leur programme, car les heures normalement prévues à l’emploi du temps ont diminué et ne suffisent pas, alors que les exigences, selon les instructions officielles, ne cessent d’augmenter ! On passe désormais un baccalauréat professionnel en trois ans, au lieu de quatre, sans que les exigences théoriques au programme aient diminué, etc.
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