lundi 27 mai 2013

Autorégulation du foutage de gueule

Entre le gouvernement et le patronat, c'est la saisons des mamours. Est-ce une raison pour nous faire prendre des vessies syntaxiques pour des lanternes politiques. 
Il y a des moments où les politiques trouvent indéniablement la formule. La formule qui vous met en rogne, et qui vous provoque, là, au saut du lit : elle se détache soudain du ronron des infos, retombe avec moult « splash » dans votre café du matin – et voilà, votre journée toute neuve est tâchée. Vous voyez le genre ? Ce fut le cas, par exemple, avec la fameuse « baisse tendancielle de l’augmentation du chômage », chef d’œuvre ciselé par Nicolas Sarkozy en pleine campagne présidentielle pour tenter de maquiller son bilan catastrophique en matière d’emploi. La courbe du chômage étant désespérément en hausse, le président candidat avait cru bon d’en référer à la dérivée et à la dérivée seconde pour finalement taper tellement à côté que le résultat oscillait entre ridicule et provocation. Le leader d’extrême gauche Olivier Besancenot avait d’ailleurs riposté quelques heures plus tard par un très ironique (mais mérité) : « en tout cas, nous n’assistons pas à la baisse tendancielle de l’augmentation du foutage de gueule. »
 
Des petits bijoux comme cette perle sarkozyste, on n’en entend pas tous les quatre matins. Ils sont rares, même. C’est pourquoi il faut aujourd’hui saluer la performance de Pierre Moscovici à sa juste valeur. Pour justifier l’abandon de tout projet d’encadrement des salaires des grands patrons, notre ministre de l’Economie a en effet expliqué qu’il préférait « miser sur une autorégulation exigeante » des pratiques du secteur. Il a dit cela aux Echos et, ni une ni deux, la phrase a été relevée sur toutes les antennes – pensez donc, une telle merveille…
 
Après le discours très social-démocrate de François Hollande en Allemagne (lire le papier d’Hervé Nathan du 23/05), Pierre Moscovici confirme donc la volonté gouvernementale de brosser le milieu des affaires dans le sens du poil. Pour expliquer ce déferlement concerté de mamours, certains, au parti socialiste, expliquent que les grands patrons se sentent tellement harcelés et mal-aimés depuis l’arrivée de Hollande au pouvoir qu’il était urgent de mettre un peu de pommade sur leurs plaies d’orgueil. On pourrait rétorquer qu’après l’abandon de la tranche d’impôt à 75% (la faire supporter par les entreprises, vous avouerez, ça ne revient pas du tout au même) et le recul sur la séparation des activités bancaires, ce gouvernement a en définitive beaucoup crié et peu agi à l’égard des milieux patronaux, ce qui est sûrement la pire des stratégies, mais passons. 

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