vendredi 10 janvier 2014

Bernard Friot : « Le management capitaliste entrave notre désir de participer au bien commun »

A l’heure où le gouvernement envisage une remise à plat de la fiscalité, l’économiste Bernard Friot propose de revoir entièrement le fonctionnement du système salarial et des cotisations sociales. Copropriété des entreprises, mutualisation des profits et salaire à vie pour tous : telles sont ses suggestions pour nous sortir du « malheur collectif » qui nous enferme depuis 30 ans dans la précarisation, le chômage, la marchandisation infinie et l’obsolescence programmée. Des réflexions à contre-courant qui, à l’instar de celles sur le revenu garanti, ouvre le débat sur l’autre société à édifier. Entretien.
Basta ! : On parle désormais davantage de « pouvoir d’achat » que de salaires. En quoi est-ce différent ? Pourquoi préférez-vous le terme « salaire » ?
Bernard Friot  [1] : La « défense du pouvoir d’achat » ne passe pas par une hausse du salaire mais par la baisse des prix – et donc des salaires – ou par des formes de rémunération sans cotisations sociales : épargne salariale, intéressement, primes… Utiliser le terme « pouvoir d’achat », c’est aussi nous réduire à nos seuls besoins à satisfaire par ce pouvoir d’achat, c’est accepter de réduire le salaire au seul prix de notre force de travail. Or, le sens du salaire a changé depuis les conquêtes ouvrières du 20ème siècle. Il n’est plus seulement le prix de notre force de travail, mais intègre la qualification et les cotisations sociales. Ces qualifications – du poste dans les conventions collectives du secteur privé, de la personne dans le grade de la Fonction publique – pourraient ouvrir de nouveaux droits. Assorti de cette cotisation et de cette qualification, le salaire affirme que nous sommes les seuls producteurs de la valeur économique, et non de simples travailleurs à qui l’on consent un « pouvoir d’achat » pour s’assurer que nous serons demain au boulot. Le salaire est un outil anticapitaliste.
Vous proposez d’associer au salaire une forme de « citoyenneté économique ». En quoi consiste-t-elle?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire